La rentrée des classes
C’est la rentrée des classes au parlement européen, et à peine le temps d’interroger Christine Lagarde et d’enchaîner les réunions que me voilà sur le départ pour Helsinki pour la conférence des présidents de groupe du parlement européen avec la Finlande, qui préside le Conseil pour les six prochains mois.
C’est ma première conférence des présidents avec une présidence du conseil (il y a d’autres conférences des présidents plus régulières, notamment pour préparer l’agenda des sessions plénières) et je ne sais pas trop à quoi m’attendre. Bonne élève, j’étudie les priorités fixées par la Finlande pour les six prochains mois à la tête du Conseil et je remarque l’accent mis notamment sur la lutte contre le changement climatique et l’évasion fiscale. Ça tombe bien, ce sont des sujets sur lesquels on a quelques attentes fortes ! Comme souvent, l’intention affichée paraît forte mais les mesures dérisoires.
Quelle drôle d’impression que de se retrouver soudainement au beau milieu de tout ce protocole diplomatique, accompagnée d’une ribambelle d’officiels, à rencontrer le premier ministre et le gouvernement puis les principaux députés finlandais. Je ne peux m’empêcher de penser au côté artificiel de la procédure, extrêmement formelle mais au final assez peu politique. Alors j’ai décidé de ne pas m’encombrer de toutes les formalités de discours pour aller droit au but et interroger la présidence finlandaise sur ses intentions concrètes : que vont-ils faire pour la Politique agricole commune (PAC) qui doit se négocier dans les prochains mois, pour le Mercosur alors que la Finlande a annoncé vouloir un embargo sur la viande brésilienne, sur la transparence fiscale des multinationales ? Le format laisse peu de temps aux échanges mais je m’assure que nos attentes sont clairement énoncées.
Les rendez-vous s’enchaînent. Au palais des États avec le gouvernement, à l’Assemblée avec les députés nationaux, à la résidence du premier ministre pour un déjeuner - sans homard ! (pour la petite histoire, ils m’ont quand même placée en face du président du groupe d’extrême droite). Et pendant toutes ces étapes, mon cerveau s’échappe parfois de mon corps pour observer la situation qui me semble si éloignée de la réalité. Qu’est ce que je fais là, escortée par un convoi de police d’un endroit à un autre, à déjeuner entourée de ministres, à faire des photos officielles comme on voit pour les sommets du G7 à la télé (avec son nom écrit par terre pour savoir où se placer) et à disserter sur l’avenir de l’Union européenne ? Certains d’ailleurs vont me rappeler que je n’ai pas la tête de l’emploi en me prenant de nouveau pour une assistante (pour la suite, on nous donnera une petit pin’s reconnaissable) quand un autre président de groupe m’appelle « Ma grande » et d’autres me font un cours d’histoire de l’Union européenne. C’est sûr que je suis née après la chute du mur de Berlin et suis de loin la plus jeune. Je n’avais jamais déjeuné avec un premier ministre jusque là. Ni était escortée par la police.
Alors je n’ai peut-être pas l’habit ou leur profil habituel. Mais je sais pourquoi je suis là. Pour porter la voix des peuples européens. Ceux qui n’ont que faire du protocole et qui attendent des réponses. Du concret. L’arrêt des accords de libre-échange climaticides. La mise en place d’une telle transition écologique avec le 100% d’énergies renouvelables. La défense de nos services publics. Une liste de paradis fiscaux réaliste. Bref, des actes pour prendre à bras le corps les défis de notre temps.
Voilà ce que nous souhaitons faire de cette présidence de groupe au parlement européen. Mettre les deux pieds dans le plat (remarquez que les déjeuners peuvent aider pour ça - ok, blague nulle), secouer des habitudes et des institutions anéanties par l’immobilisme diplomatique. Mais aussi créer des solidarités (c’était l’occasion de rencontre nos alliés de l’alliance d’en gauche en Finlande, cf. Photo centrale). Et de se battre pour démontrer qu’une alternative à l’économie dérégulée et au libéralisme est plus que jamais possible. Comptez sur mon énergie (avec ou sans pin’s de presidente de groupe ! 😉 )
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