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Obsession : Paradis fiscaux

Billet d'humeur 1 septembre 2019

Ma famille vient d’un village à la pointe sud de la Corse, Bonifacio. Un petit village de pêcheurs qui dès que les premières chaleurs apparaissent (en réalité, il y fait bon toute l’année mais chuuut ne le répétez pas) reçoit son flot de touristes en quête de soleil et son défilé... de yachts ! Ces yachts, tels des immeubles perchés sur l’eau, et dont certains peinent à entrer dans le port de par leur immensité, représentent à eux seuls la quintessence de la richesse et des inégalités. Cette année, record battu avec un yacht de 85 m dans l’étroit port. Des Kim Kardashian à Maître Gims (dont le yatch a pris feu au large de Bonifacio) en passant par Samuel L.Jackson, ces yachts rivalisent de luxe ostentatoire entre leur piscine sur le pont, équipage aux petits soins et langoustes servies tout juste pêchées. Je vous passe l’utilisation extensive de l’eau douce pour récurer le moindre centimètre de leur paquebot, alors que la région manque cruellement d’eau. Ou encore les 2 000 litres de diesel brûlés par heure par certains. La planète avait bien besoin de cela.

Depuis mon plus jeune âge, nous avons une tradition dans la famille : faire le tour de la marine, y manger une glace et regarder les bateaux. Et s’interroger sur leur provenance. Sur nombre d’entre eux, est inscrit en lettres d’or : GeorgesTown. A tel point qu’un bonifacien s’interroge : « qui est ce Georges qui possède tous les bateaux ? »

GeorgesTown, c’est la capitale des Îles Caïmans. Un paradis fiscal de la couronne britannique qui abrite officiellement plusieurs milliers de yachts... pour à peine 280 km carrés et plus de 30 000 habitants. Rassurez-vous, les yachts ne s’y entassent pas et la plupart n’y ont d’ailleurs jamais fait ne serait-ce qu’une escale. C’est que la législation y est plutôt attrayante pour ces ultra-riches en mal d’argent : pas d’impôts sur les bateaux, un droit du travail ainsi qu’une règlementation en matière de sécurité et d’environnement très souples (tout est bon à prendre pour les plus puissants !). 

Alors chaque été, c’est le même rituel familial : un tour quotidien de Marine et une observation des derniers pavillons à la mode pour ces ultra-riches. Malte, Îles Vierges britanniques, Delaware, Jersey, Guernesey... pas un n’est immatriculé en dehors d’un paradis fiscal. Seuls les tendances évoluent (à ce sujet, Malte, paradis fiscal au cœur même de l’Union européenne, remonte dans les tendances ces dernières années). La raison d’être de ces immatriculations, elle, ne varie pas : payer le moins d’impôts possible. 

Alors, la petite fille incollable sur les drapeaux que j’étais a fait de cette tradition familiale à observer les bateaux une obsession : combattre les paradis fiscaux qui pillent nos recettes fiscales et font exploser les inégalités. A Oxfam d’abord, puis au parlement européen désormais, je sais que tant qu’il y aura des yachts immatriculés dans des paradis fiscaux sur le port de Bonifacio, il faudra continuer à combattre sans relâche les mécanismes qui permettent l’évasion fiscale et ceux qui en profitent. Et au vu du nombre de pavillons arborant les couleurs de paradis fiscaux cet été encore, croyez-moi qu’il y a de quoi s’obséder et que la bataille est encore longue !

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