Interview Libé : La Nupes est la seule alternative, qui oserait briser cela ?
Nous devons montrer aux Français qu’on est capable de gouverner ensemble. A chacun de clarifier les choses désormais. J’appelle toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans le programme et la démarche de la Nupes à se retrouver pour faire mieux. Les jeunes de la Nupes l’ont démontré sur les questions européennes en proposant un programme commun. Pourquoi ont-ils réussi là où les directions ont failli ? Je regrette que nos partenaires aient refusé ce programme sans pointer un seul point de désaccord de fond. Je m’engage à le porter quoi qu’il arrive aux élections européennes.
Interview publiée dans Libération.
Les socialistes ont posé un moratoire sur leur participation à la Nupes, les communistes en ont acté l’impasse… L’union est-elle morte ?
Non, bien sûr ! Il faut prendre un peu de recul. D’abord, je note que ceux qui l’attaquent en priorité, comme Fabien Roussel, Raphaël Glucksmann ou Yannick Jadot, ne l’ont en réalité jamais soutenue. Ensuite, il y a eu des effets d’annonce, mais les parlementaires communistes et écologistes n’ont pas suspendu leur participation à l’intergroupe. Et les socialistes en sont finalement restés à un «moratoire» confus. On voit bien que personne n’assume de rompre la Nupes. Tout simplement, car elle correspond à une aspiration forte des électeurs de gauche. Macron impose l’un des budgets les plus austéritaires de notre histoire, il ne fait rien face à la pauvreté, ne respecte pas l’accord de Paris : ça mérite de faire front commun, non ? La Nupes est la seule alternative possible et le seul rempart face à Marine Le Pen. Qui oserait briser cela ?
Avez-vous compris en quoi consistait le moratoire du PS ?
Non et je ne crois pas être la seule ! Remettent-ils en cause le programme de la Nupes sur lequel leurs députés ont été élus ? Quelles sont les conditions pour qu’ils reviennent ? Ils parlent dans leur texte du «besoin de plus d’union» tout en la brisant. Personne n’y comprend rien.
Comment la Nupes en est-elle arrivée là ?
Soyons lucides : la crise couvait depuis longtemps. Nous avons échoué, et je le regrette profondément, la phase d’approfondissement. A LFI, nous n’avons cessé de proposer une structuration locale, des négociations sur toutes les échéances électorales et la création d’une agora en lien avec la société civile. Sur ces trois points, on a reçu une fin de non-recevoir des autres partis. Je pense qu’il faut désormais avancer en éclaireur sujet par sujet avec ceux qui le souhaitent, sans attendre que chaque formation se renvoie la balle pour justifier de ne rien faire. L’unité est un combat et c’est justement quand il est difficile qu’il faut continuer à le mener.
Vous, personnellement, qu’avez-vous pensé des termes utilisés par LFI suite aux attaques en Israël ?
Nous avons condamné avec fermeté les atrocités du Hamas à l’encontre de civils israéliens. Pour que ces actes abominables soient jugés, ils devront être qualifiés comme crimes de guerre ou crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale. Je comprends l’utilisation du mot «terrorisme» pour décrire l’horreur et je l’ai personnellement utilisé. Personne ne demande d’ailleurs de retirer le Hamas de la liste européenne des organisations terroristes. En revanche, je ne suis pas dupe de la volonté de certains de reprendre le concept dangereux de «guerre contre le terrorisme» popularisé par Bush après le 11 Septembre et auquel la France s’était à raison opposée. Au-delà du débat lexical, il y a urgence à soutenir la paix et le cessez-le-feu immédiat face à la catastrophe humanitaire en cours et le bombardement indiscriminé des civils.
Chez vos partenaires, beaucoup reprochent aux insoumis et notamment à Jean-Luc Mélenchon une sorte de brutalisation…
Je pourrais répondre qu’exclure LFI sans discussion de l’accord pour les sénatoriales, ça c’est brutal. Mais on ne doit pas refaire le match. Je suis convaincue qu’une réelle structuration aurait permis de résoudre nos débats. Avec une agora, on aurait par exemple pu travailler avec les ONG et les spécialistes pour parler d’une voix commune sur le conflit israélo-palestinien. Ne nous mentons pas : les anti-Nupes n’ont jamais voulu ces espaces de discussion, car ils refusent que la Nupes soit autre chose qu’une alliance électorale.
La situation est-elle résoluble ?
Elle doit l’être. Nous devons montrer aux Français qu’on est capable de gouverner ensemble. A chacun de clarifier les choses désormais. J’appelle toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans le programme et la démarche de la Nupes à se retrouver pour faire mieux. Les jeunes de la Nupes l’ont démontré sur les questions européennes en proposant un programme commun. Pourquoi ont-ils réussi là où les directions ont failli ? Je regrette que nos partenaires aient refusé ce programme sans pointer un seul point de désaccord de fond. Je m’engage à le porter quoi qu’il arrive aux élections européennes.
De plus en plus de voix à gauche, y compris des partisans de la Nupes, estiment que l’avenir doit s’écrire sans Jean-Luc Mélenchon. Qu’en pensez-vous ?
Je pense que revenir tout le temps aux questions de personnes, c’est la solution de facilité. Qui peut croire qu’on peut conquérir le pouvoir en disant que celui qui a réuni 22 % à la présidentielle est la cause de tous les problèmes ? Ce n’est pas sérieux. On ne réalisera pas l’unité de notre famille politique en rejetant sa principale force, La France Insoumise. La gauche n’arrivera jamais au pouvoir si elle se complaît dans des batailles d’appareils qui défendent leurs prés carrés. Consolidons le collectif plutôt que de le solder !