Lettre à Gisèle Pélicot
Chère Gisèle,
Au moment du verdict, vous vous êtes tenue droite, digne. Comme à chaque étape de ce procès qui fera l’histoire.
Tout au long de ce procès, vous nous avez ému·es. Vous nous avez surpris·es par votre résilience. Et vous nous avez donné une force incroyable pour combattre la culture du viol.
Car en ouvrant grand les portes de ce procès à la société française, vous avez permis qu’il se transforme en procès de la culture du viol.
Illustrée encore à la sortie du tribunal où un avocat de la défense a osé dire “Il y a un message de la part de mon client, à toutes ces HYSTÉRIQUES, c'est MERDE.”
Illustrée par les questions humiliantes qui vous ont été infligées, sur le “naturisme” ou soit-disant “alcoolisme”. Un procédé qui porte un nom : la victimisation secondaire.
Alors oui, comme beaucoup de personnes, je ressens aujourd’hui un mélange de sentiments.
Le soulagement que les coupables du procès de Mazan aient été condamnés même si certaines peines auraient pu être plus lourdes
La rage contre le parcours du combattant pour les victimes de violences sexuelles en France.
L’espoir avec l’immense élan féministe qui s’est levé autour de ce procès et qui ne devra plus jamais retomber.
Je pense évidemment à toutes les victimes qui n’ont pas accès à la justice.
Parce qu’en France, moins de 1% des viols sont condamnés.
Parce que la parole des victimes n’est pas prise au sérieux.
Parce que le parcours judiciaire s’apparente trop souvent à un chemin semé d’embûches.
Chère Gisèle, vous avez déclaré au début de votre procès:
“Je voulais que toutes les femmes victimes de viol se disent : « Madame Pelicot l’a fait, on peut le faire. ».”
Vous l’avez fait. Et rendu ce procès historique.
Vous n’imaginez pas la force que vous avez donné à de très nombreuses victimes.
Il y a encore tant à faire.
Pour protéger les victimes d’une victimisation secondaire.
Pour attribuer suffisamment de moyens à la lutte contre les violences sexuelles.
Pour intégrer la notion de consentement dans la définition du viol.
Mais avec ce procès, la honte a déjà un peu changé de camp. Comptez sur nous pour ne pas nous arrêter en si bon chemin !