Total saccage la planète et les droits humains en toute impunité
Le mégaprojet pétrolier de Total en Ouganda et en Tanzanie s’annonce comme l’un des plus grands crimes jamais commis par une entreprise contre les droits humains et l’environnement. Un crime commis avec la complicité personnelle d’Emmanuel Macron et au mépris de la loi française. Enfin, après des mois d’alerte, le Parlement européen a adopté une résolution pour demander l’arrêt du projet.
Quelques chiffres aident à se rendre compte de l’ampleur démentielle du projet. Il s’agit d’un investissement de près de 10 milliards d’euros pour forer et exploiter plus de 400 puits de pétrole dont 140 seront creusés dans une aire naturelle protégée. Pour transporter le brut, Total et ses partenaires construisent le plus long pipeline chauffé au monde, appelé EACOP. EACOP est constitué de plus de 1400 km de tuyaux sous pression, maintenus en permanence à 50 °C, qui relieront le site d’extraction au port de Tanga en Tanzanie. C’est, à titre de comparaison, la distance qui sépare Bruxelles de Madrid.
Le projet de Total est une catastrophe humaine, environnementale et climatique.
Sa construction va affecter environ 100 000 personnes, notamment des centaines de familles arrachées de leurs terres, de leurs champs et privées de leurs moyens de subsistance. Journalistes et associations ont répertorié de nombreux cas d'expulsions menées par la menace et la violence, sans compensation adéquate. Quant à ceux qui tentent de lancer l’alerte, ils font face à de lourdes représailles. Un chef communautaire venu témoigner devant les tribunaux français a été arrêté et questionné par la police à son retour en Ouganda, un autre témoin a été victime de tentative d’effraction à son domicile, des journalistes ont été arrêtés, etc.
L’exploitation et le transport du pétrole présentent également des risques de pollution d’une ampleur inédite. Le champ de pétrole exploité s’étend sous le lac Albert et le tracé du pipeline traverse plus de 230 cours d’eau tout en passant tout proche du lac Victoria. Le risque de fuite et de pollution menace ainsi l’accès à l’eau de pas moins de 40 millions de personnes. Et l’histoire tragique de la pollution du delta du Niger par Shell, qui a fait des dizaines de milliers de victimes, témoigne de l’importance de ce risque.
Enfin, le projet de Total est une véritable “bombe climatique”. Plus de 200 000 barils de pétrole seraient extraits chaque jour, ce qui correspond à la consommation de pétrole du Portugal. Faut-il le rappeler : nous devons à tout prix diminuer notre consommation de pétrole pour contenir l’ampleur du chaos climatique à venir et chaque forage d’un nouveau puits de pétrole aggrave le désastre à venir.
Pourtant, Total a un allié de poids dans son entreprise climaticide : Emmanuel Macron. Comme l’a révélé Mediapart, le président a apporté son soutien personnel à Total auprès du président ougandais. En témoigne une lettre signée de sa main en 2021. Mais la responsabilité de l’Etat français va plus loin, l’ambassade de France à Kampala (dirigé par un proche du président) ayant joué le rôle d’entremetteuse entre Total et le gouvernement ougandais à de nombreuses reprises.
Surtout, le gouvernement français ne semble pas vouloir faire respecter ses propres lois à Total. La France a en effet adopté une loi sur le devoir de vigilance en 2017 qui oblige les grandes entreprises françaises à identifier, prévenir et remédier aux atteintes aux droits humains et à l’environnement commises par leurs filiales et sous-traitants. De toute évidence, Total ne respecte pas ses obligations et pourtant, l’Etat français ne fait rien. C’est donc aux associations, notamment les Amis de la Terre, de traîner Total devant les tribunaux pour espérer mettre fin à son impunité.
Par la résolution que nous avons adoptée, le Parlement européen a le mérite de dénoncer l’aberration du projet de Total quand le gouvernement français se mure dans un silence complice. Mais à y regarder dans le détail, certains députés français ne semblent pas pressés de protéger les droits humains plutôt que les profits des entreprises !
Les députés Renaissance (LREM), Les Républicains et Rassemblement national ont ainsi voté contre mon amendement proposant de condamner le soutien direct ou indirect d’Etats membres, comme la France dans le cas de Total, aux projets des multinationales qui portent atteinte aux droits humains. Ils ont également refusé de reconnaître l’échec évident de la France à faire respecter à Total sa loi sur le devoir de vigilance.
Les députés Rassemblement national ont tout de même gagné la palme en s’opposant à l’adoption à venir d’une directive européenne sur le devoir de vigilance. Cette directive pour laquelle je me bats depuis des mois est pourtant essentielle pour protéger les droits humains des violations commises pour le compte des entreprises. Elle est aussi nécessaire afin de pallier les failles évidentes de la loi française de 2017. Mais ce sera sans le Rassemblement national qui entretient sa complicité avec les grandes entreprises aux mains sales. Une connivence bien illustrée aussi par les courbettes du député Jean Philippe Tanguy devant le patron de Total lors de l’audition organisée par mon collègue Manuel Bompard sur les superprofits : à entendre l’éloge par M. Tanguy de cette “grande entreprise française, dirigée par des patriotes” que serait Total, on comprend bien quel camp choisit le RN entre celui des grands patrons et celui des peuples et de la planète.
Mais revenons-en à la situation en Ouganda et soulignons tout de même un point important acquis par la résolution du Parlement européen que nous avons fait voter. Elle exige en effet deTotal un moratoire d’un an avant le lancement du projet afin d’en évaluer les impacts et les alternatives. Nous avons également obtenu que l’Union européenne fasse pression sur Total pour arrêter les activités d’extraction dans des écosystèmes protégés et sensibles, y compris sur les rives du lac Albert en Ouganda.
Alors maintenant, aux actes : il faut stopper le crime de masse que commet Total en Ouganda ! Et pour que ce saccage ne se reproduise plus, il est temps d’élaborer une véritable directive sur le devoir de vigilance des multinationales : c’est mon combat depuis des mois, place maintenant aux négociations du texte dans les prochaines semaines !