Vote de la PAC : Un hold-up démocratique au détriment de la planète et des paysans
Il y a de ces semaines qui comptent particulièrement dans le mandat de députée européenne. Cette dernière en fait certainement partie avec le vote de la Politique Agricole Commune. Ce n’est pas uniquement le 1er budget de l’UE (+ de 400 milliards d’euros !) mais un vote qui nous engage jusqu’en 2027. C’est aussi un enjeu écologique majeur puisque l’agriculture est responsable de plus de 20% des émissions de gaz à effet de serre. Je pense également à tous ces paysans que j’ai rencontrés qui ne touchent quasiment rien de la PAC alors que les agro-industries se gavent (80% des aides distribuées aux 20% d’exploitations les plus grandes). Bref, c’est un enjeu politique majeur sur le climat, la biodiversité, mais aussi les conditions de vie des agriculteurs, la souveraineté alimentaire, la régulation du libre-échange, le bien-être animal. Un vote déterminant. Qui s’est déroulé dans des conditions pour le moins rocambolesques !
Nous ne sommes pas naïfs (on commence à avoir l’habitude maintenant...) et nous savions bien que la partie n’allait pas être facile. L’adversaire était connu : le lobby de l’agro-industrie et ses relais chez les sociaux-démocrates, les libéraux et la droite européenne. Eux qui n’ont pas lésiné sur les moyens depuis des mois pour bloquer toute régulation environnementale, toute redistribution des gros vers les petits, toute transition d’un modèle chimique polluant vers un système paysan biologique.
Mais on ne pensait pas qu’ils iraient aussi loin dans la violence institutionnelle des moyens utilisés pour passer en force. Les négociations de la PAC durent depuis deux ans mais les groupes libéraux ont attendu la semaine dernière pour signer entre eux, sans aucune transparence, un accord actant la mort de toute transition écologique et sociale de notre agriculture.
Et comme ils avaient peur que l’opinion se saisisse du sujet et que cela complique le vote de leurs horreurs, ils se sont dits qu’il fallait limiter à tout prix la possibilité pour les groupes d’opposition de faire entendre une voix discordante.
Résultat : au lieu d’un débat démocratique enflammé mais serein, projet contre projet nous avons eu droit à un festival d’accords de couloirs, de manipulations sournoises, de bidouillages médiocres. Jusqu’à la cerise sur le gâteau sur le déroulement des votes. Lundi 23h, nous apprenons que les votes sont avancés d’un jour et démarrent dès le lendemain. Mais ça ne s’arrête pas là. Listes de votes transmises à la toute dernière minute pour que plus personne n’ait le temps de préparer sérieusement son analyse des compromis proposés. Interprétations malhonnêtes du règlement du parlement européen pour empêcher le vote de certains amendements. Recours aux votes bloqués par paquet pour interdire toute possibilité de dissidence parmi les députés récalcitrants des grands groupes. Bref, une mise au pas en règle du Parlement pour forcer tout le monde à valider comme un seul homme un accord indéfendable. L’équivalent d’un vrai 49-3 dont LREM est si familière. A Bruxelles comme à Paris, même vision du respect des principes démocratiques de base.
Alors bien sûr, cette manière de faire donne la nausée. Mais nous n’avons pas baissé les bras, bien au contraire !
Avec notre groupe de la Gauche Unitaire Européenne dans lequel siège la France Insoumise et avec les verts, nous avons déposé une motion de rejet et des centaines d’amendements, dénoncé leurs magouilles, bataillé sans relâche dans l’hémicycle, les médias et sur les réseaux sociaux, pour relayer les alertes des ONG et mettre la pression sur les eurodéputés libéraux. Bref, on y a jeté toutes nos forces. Puis les jeunes pour le climat sont venus en renfort avec le lancement d’une mobilisation en ligne à travers toute l’Europe sous le hashtag #VoteThisCAPdown (rejetez cette PAC). Ils nous ont donné plus de force et de poids. Et grâce à la mobilisation, nous sommes parvenus à convaincre au-delà de nos groupes : deux fois plus de députés se sont opposés à ce projet de PAC que notre nombre initial.
Mais ça n’a malheureusement pas suffi : par 425 voix contre 212 ce projet de PAC anti-écologique et anti-social est adopté. L’UE en reprend pour plusieurs années d’un système qui subventionne les fermes usines et les grands pollueurs au lieu de soutenir l’agriculture biologique paysanne.
Mais le combat ne s’arrêtera pas là. Au parlement européen, nous avons lancé l’alerte. Et avec votre soutien, on continuera à se battre. Pour nos paysans. Pour notre santé. Pour notre planète.
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